SOBEL (B.)

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SOBEL BERNARD (1936- )

Détenteur d’une licence d’allemand, le jeune Bernard Rothstein, qui adoptera plus tard le nom de sa mère dans le cadre de ses activités théâtrales, obtient à la fin des années 1950 une bourse pour poursuivre ses études en R.D.A. Il restera quatre ans au Berliner Ensemble dirigé par la veuve de Bertolt Brecht, Hélène Weigel. Là, il met en scène L’Exception et la Règle en 1957, avant de s’installer à Paris et de participer au côté de Jean Vilar à la réalisation d’Arturo Ui au T.N.P. en 1960. L’année suivante, il fait partie des fondateurs du Théâtre Gérard-Philipe de Saint-Denis.

Le parcours de Bernard Sobel est indissociable de l’Ensemble théâtral de Gennevilliers (E.T.G.), fondé en 1964 à partir d’un collectif amateur qui donna son premier spectacle professionnel en 1970 (Homme pour homme de Brecht) et bénéficie depuis 1983 du statut de centre national dramatique. Lieu de création, de réflexion sur les implications de l’acte théâtral dans la cité (les premiers spectacles se jouent parfois hors de l’enceinte théâtrale), l’E.T.G. sera le tremplin de metteurs en scène de renom, comme Patrice Chéreau ou Bruno Bayen, accueillis par Sobel. Celui-ci se dote dès 1974 d’une revue, Théâtre/Public , ouverte le plus largement possible à l’activité des praticiens de tous horizons.

Outre son activité de réalisateur de télévision (il fut formé à l’O.R.T.F.), pour laquelle il adapte entre autres certaines de ses réalisations théâtrales, voire des projets originaux (L’Orestie d’Eschyle en 1989), Sobel est un metteur en scène prolifique. En matière d’auteurs, sa prédilection va à Brecht, constante référence de sa pratique (Têtes rondes et têtes pointues , 1973; La Bonne Âme de Se-Tchouan , 1990), mais aussi aux auteurs allemands qui ont nourri la réflexion brechtienne, en amont: Lenz (Le Précepteur , 1975; Les amis font le philosophe , 1988), Kleist (La Cruche cassée , 1984), Lessing (Nathan le Sage , 1987), Schiller (Marie Stuart , 1983), ou à celui qui l’a prolongée et mise en crise, Heiner Müller (le montage du texte de Brecht inachevé: Déclin de l’égoïste Johann Fatzer , 1981; Philoctète , 1970 et 1984). Il restera l’un des redécouvreurs en France d’Alexandre Ostrovski (La Forêt , 1989, après avoir sollicité l’édition de ses œuvres complètes dans les années 1970) et du théâtre d’Isaac Baabel (Marie , 1975; Zakat , 1997). Mis à part Molière (Dom Juan , 1973; L’École des femmes , 1985; Tartuffe , 1978 et 1990), ou Claudel (La Ville , 1986), les Français le retiennent peu.

Pour Bernard Sobel, marxiste attentif au rôle des masses dans l’histoire, la démarche théâtrale s’inscrit dans une réflexion morale et politique, comme si «la scène n’était pas le reflet de la réalité mais devenait un lieu de réflexion sur la réalité». Il s’agit donc d’interroger les formes, le devenir historique des codes esthétiques et leur implication idéologique. Sobel a étudié dès le début des années 1970 la sociologie, les travaux d’Althusser, de Bakhtine, renouvelant par exemple l’approche de la fable. C’est dans cette optique qu’il aborde le théâtre baroque européen, Marlowe (Le Juif de Malte , 1975-1976; Édouard II , 1981). L’un des écueils, que n’évitait pas son Dom Juan , tient à la simple addition de registres divers, de la tragédie lyrique à la pastorale, en passant par la comédie de mœurs. Quant à Shakespeare, Sobel voit en lui l’ancêtre du principe de distanciation, et le tire, du moins dans les premiers temps, du côté du Lehrstück , ce théâtre didactique brechtien. D’où une réputation de raideur péremptoire, due aussi à la virulence de ses prises de position (Sobel est inscrit au parti communiste et conseiller municipal de Gennevilliers à partir de 1983). On ne saurait lui reprocher pourtant de vouloir réactiver les vertus essentielles du théâtre, celles d’un espace de mise en débat des crises qui agitent la démocratie. C’est ainsi que la dialectique marxiste ou brechtienne rejoint sa pratique artistique.

Indépendamment, son art de la mise en scène (qui s’exerce aussi dans l’art lyrique) peut accoucher de réussites rares. La plus récente est incontestablement Napoléon ou Les Cent Jours , de Grabbe (1996), épopée dramatique du début du siècle dernier réputée injouable (les didascalies y décrivent notamment les mouvements de troupe et les accidents du champ de bataille). Rythmée par une fanfare désuète, l’action se déroule, alternant les modes, épique et dramatique, traversant les lieux et les milieux les plus divers, le foisonnement du tissu social étant restituée par la présence d’un chœur dirigé avec une précision toute musicale.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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